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Estivat de Bueus 2024 : Gilets jaunes, bordélisation, tu t'es déjà mis devant des cornes ? t'as qu'a y aller, toi, pédé va ! - Humeur post Madeleine

Crédit photo - Aitor LARA - MAESTRANZA - www.aitorlara.com

On ne va pas s'appesantir à notre tour sur le pauvre contenu taurin de la Madeleine 2024. Tout a déjà été dit, écrit, raconté et commenté, et nous ne pouvons que souscrire à toutes ses expressions de  déception. 

Non ! Nous, on souhaite aborder l'exercice du bilan sous un autre angle; celui de la liberté d'expression, car ça nous semble être la pierre angulaire de cette édition 2024 !

Aller aux toros, par définition, pour l'immense majorité des spectateurs, aficionado ou non, c'est d'abord regarder le cartel qui est proposé par l'organisateur et décider, selon sa sensibilité, de passer par le guichet pour y acheter une place.  C'est cette démarche, et uniquement celle là, qui fait tourner économiquement le système taurin. Alors bien sûr, il faut des éleveurs pour fournir les toros, des toreros pour les affronter, des organisateurs pour aller choisir les toros et engager les toreros, et des apoderados et des empresas pour faire croire à tout le monde que sans eux rien ne serait possible. Certes ! mais pour que tout cela existe, dans nos sociétés contemporaines, il faut le financer ! Car ne nous y trompons pas, ce n'est pas une loi sur le bien être animal qui mettra fin à la corrida. Du moins pas tant que celle-ci sera protégée par un système financier viable, capable de rémunérer tous les acteurs et de créer des retombées économiques plus larges : pour une commune, un territoire, les professionnels du tourisme, de l'hôtellerie, de la restauration...                                       

Le jour où ce système n'apportera plus ces garanties économiques, il sera vulnérable. Ses défenseurs se feront rares et ses détracteurs trouveront facilement des alliés pour porter le coup fatal à la fiesta (et l'argument de la tradition ne pèsera pas lourd face à l'argent roi !).

Dans cette logique, on le comprend aisément, le spectateur, aficionado ou non, mais obligatoirement payeur, se retrouve au centre du système. Pour autant, les autres acteurs, qui dépendent directement de lui et de sa démarche de passer par le guichet pour acheter une place, se permettent de se foutre littéralement de sa gueule à leur guise !

Comment ? Les toreros en refusant de toréer certains toros, en imposant un cachet exorbitant et en choisissant leurs compagnons de cartel. L'éleveur en se pliant à la volonté des toreros de ne toréer que des toros au comportement docile et collaborateur. Les organisateurs en acceptant ce système et en survendant, en toute connaissance de cause, les courses qu'ils mettent sur pied. Les apoderados et les empresas en faisant croire que sans eux rien ne serait possible (on l'a déjà dit ...).

Crédit photos - Aitor LARA - MAESTRANZA -  www.aitorlara.com

Alors quand le spectateur, aficionado ou non, qui fait la démarche de passer par le guichet pour acheter une place, constate que le spectacle auquel il assiste de droit, puisqu'il est passé par le guichet pour acheter une place lui donnant droit d'entrer dans l'arène pour suivre la course, n'est pas à la hauteur de ce qui est annoncé par les autres acteurs du monde taurin, il nous semble qu'il a toute liberté d'exprimer son mécontentement. A l'inverse, personne ne s'émeut, ni dans la presse, ni dans les couloirs de l'arène, ni sur les réseaux sociaux, ni sur les ondes (invité ou non), des manifestations de joie, justifiées ou non, de ces mêmes spectateurs, aficionados ou non !

La liberté d'expression dans une arène serait donc à géométrie variable ? Quand ça flatte l'égo de ce mundillo de pacotille, ça va ! A l'inverse, si le spectateur ose dénoncer, à juste titre, la supercherie qu'on lui inflige, là, non ! Y a bordélisation, prise en otage de l'arène, manque de respect du bénévole qui a fermé son commerce, prise en photo du contrevenant qui a osé l'ouvrir, insulte du voisin qui se sent légitime parce que lui aime qu'on se foute de sa gueule apparemment et représailles physiques tout aussi légitimes dans les couloirs de l'arène... tout ça pour une question de respect, bien sûr ! 

Drôle de conception de la liberté d'expression, et surtout drôle de conception du respect que l'on doit à l'acteur principal du système économique taurin : le spectateur, aficionado ou non [...] vous commencez à avoir compris. 

Ce texte lui même, à n'en pas douter, n'échappera certainement pas à la loi de cette conception de la liberté d'expression que l'on souhaite imposer dans nos arènes.

Petite réflexion d'ouverture en guise de conclusion, et si les acteurs taurins qui vivent sur des deniers des spectateurs, dépensaient autant d'énergie à entendre la critique et à la prendre en compte, qu'à censurer la liberté d'expression, les choses iraient peut-être mieux non ?

Car le dimanche de la Madeleine, quand en piste il y avait un lot de toros de respect (Victorino Martin), personne n'a manifesté, ni bordélisé, ni invectivé... Peut-être que ce jour-là, le spectateur, aficionado ou non, qui fait la démarche de passer par le guichet pour acheter une place, a senti qu'enfin il était respecté.

Communiqué des spectateurs, aficionados ou non, qui par leur choix d'assister à une corrida, financent le système taurin et ses diverses retombées et qui se réservent le droit d'exprimer leurs émotions bonnes ou mauvaises dans l'enceinte de ce qu'ils considèrent encore être un lieu de liberté.