La période d'incertitude que nous traversons est propice, plus que toute autre chose, à la réflexion. Réflexion qui se mue indubitablement en une forme de projection vers un hypothétique après forcément synonyme de "jours meilleurs" voire même de "jours heureux" .
Divagations temporelles qui nourrissent en nous un besoin de réponse à l'interrogation aussi simpliste que pugnace : Comment sera la vie après tout ça ?
Seule finalité de cette gymnastique fictionnelle, l'élaboration d'éléments de réponse, même primitifs, semble s'imposée à nous sous une forme somme toute binaire : conserver l'essentiel tout en se détachant du non-essentiel. Dans la tête des aficionados que nous restons obstinément, l'exercice réflexif place bien évidemment la tauromachie dans la catégorie des essentiels. Premiers flirts avec la chimère d'une société post-covid qui n'aurait pas profité de la mise sous cloche de la diversité des goûts pour imposer autoritairement son intolérante unicité.
Pour le moment, l'espoir nous est permis et nous fait tenir et garder la foi en un monde d'après meilleur que celui que nous quitterons, à n'en pas douter, sans trop de regret. Ainsi, donc, rien ne nous empêche, pour l'heure, de nous arrêter un instant sur ce que sera la tauromachie, puisque toujours vivante, dans un avenir débarrassé de tout virus liberticide ! N'est-il pas ?
6 toros ! C'est plus vraiment la norme...
A l'automne 2020, nous avons assisté, par écran interposé, au cycle de la "gira de reconstruccion". Une série de spectacles taurins, 3 novilladas, 3 corridas de rejon et 15 corridas, au cours desquels, le format adopté majoritairement était allégé de 2 toros et 1 torero. 4 toros pour 2 toreros, donc, pour une formule certainement étudiée pour cadrer avec le média télévisuel mais qui pourrait préfigurer, dans un monde post-crise sanitaire, la norme taurine, en distanciel comme en présentiel ! Affaire à suivre...
Quid du tercio de piques...
Courant du mois de septembre 2020, nous sommes tombés, un peu par hasard il faut bien l'avouer, sur un cycle de conférences virtuelles, crise sanitaire oblige, autour du thème de la tauromachie du XXI° siècle et de ses nécessaires adaptations à son époque. Parmi les multiples points développés, le plus intéressant d'entre eux se trouvait être le chapitre sur la pique. (un résumé de l'ensemble de la vidéo est proposé par l'excellent site "Asociacion Toreo en Red Hondo" à lire ici)
Tout commence par un constat, aujourd'hui bien connu de tous, de l'état dans lequel la tauromachie moderne plonge le tercio de varas. En substance, un tercio qui a du mal à exister face au surexposé troisième tiers initialement nommé "tercio de muerte", aujourd'hui régulièrement nommé tercio de muleta, et pour cause. De fait, se pose la question de l'utilité de son existence.
Une fois le constat dressé et l'affirmation posée de la nécessité de redonner la place qu'il mérite à ce tercio essentiel à la survie de la tauromachie, est abordé l'aspect matériel du moment comme un élément de réponse.
La quadrature de la pyramide
Aujourd'hui, les piques utilisées en Andalousie, Castille et Léon, Pays basque et France sont composées d'une partie pénétrante de 73 mm. Dans le reste du monde taurin, cette même partie mesure 86 mm.
Les piques sont de forme pyramidale à base triangulaire, ce qui ouvre grand la porte à un jeu de dupe largement pratiqué dit du "à l'endroit/à l'envers" (voir ici), qui donne lieu à une partie de menteur-menteur entre les délégués aux piques (lorsqu'ils existent), les piqueros, et le public savamment arbitré par les toreros.
Facette pitoyable de la tauromachie du XXI° siècle, ce moment relevant plus de la tartufferie que de la tauromachie, dans lequel le picador endosse le rôle principal sous les quolibets jouissifs d'un public trompé mais complice et d'un torero innocent et pourtant largement coupable.
Eh bien, nous dit-on au fil des débats, le monde taurin d'après pourrait bien être débarrassé de cette mauvaise comédie. En effet, toujours dans le cadre de ce cycle de conférences, une alternative a été proposée : adopter des piques à base carrée, qui interdiraient de fait toute pratique fallacieuse.
En photo ci-dessous, une pique rouge, pyramidale à base carrée donc, qui présente une partie pénétrante de 67 mm.