95% de remplissage...
L'aficionado ne représente rien ! Ou si peu. Disons qu'il ne pèse pas lourd dans la balance décisionnelle taurine. Comme dans l'histoire du mec qui se demande si un pet ça pèse lourd. Et son copain de lui répondre que non forcément, c'est un gaz (on vous épargnera la chute). Dans le camembert odorant et néanmoins synthétique du taux de remplissage des arènes, l'aficionado est un gaz, un pet...
La quasi entièreté de ce camembert coulant est occupé par le "grand public". Lui il pèse, il compte. C'est un fait qui ne date pas d'aujourd'hui. La tauromachie doit certainement sa survie à ce public bigarré, composé de célébrités comme d'anonymes se dopant à l'adrénaline d'un exotisme teinté de subversivité.
Ce constat, les "Taurinos" (ceux qui vivent du toro) l'ont tiré et digéré très tôt. Imprimant sur l'offre taurine des modes susceptibles d'attiser la curiosité de ce grand public.
Les conséquences sur les contenus taurins sont multiples. De la starisation des toreros à l’avilissement des toros, en passant par le déclin du premier tiers au profit de l'avènement d'un troisième tiers hypertrophié ; le monde taurin entreprend les réformes nécessaires à sa survie, à sa pérennité économique quitte à édulcorer, dénaturer, défigurer le rite, la tradition, la passion.
Le toro n'attire pas ou plus. A-t-il seulement attiré les foules, d'ailleurs ? Peu importe, on le réforme, le transforme, le déforme, afin qu'il soit conforme au prérequis du spectacle le plus à même de remplir les arènes. A ce point tordu et dévitalisé quel avenir peut bien tracer ce toro ne tenant qu'un simple rôle de figuration au sein du grand spectacle de divertissement taurin.
N'est-il pas du plus mauvais goût de le voir en situation de faiblesse, à bout de souffle, s'étalant de tout son long, maculant de son propre sang épais et visqueux le sable sacralisé d'une plaza de toros ensoleillée et festive. Vulgaire allégorie de l'abattoir à ciel ouvert, scène d'agonie ostentatoire que les ennemis jurés de la corrida ne manquent pas d'inscrire dans l'argumentaire de leur folie aveugle abolitionniste. Même les "figuras" s'en plaignent, c'est dire !
Ce monde des toros que l'on veut éthique, vertueux, séculaire et raffiné ne peut décemment pas s’accommoder d'une telle publicité mensongère.
Le toro de verdad pour les affiches, le medio toro pour le sable
Non, ce qu'il faudrait c'est un toro qui présente bien, qui ne tombe pas et qui sache tenir strictement son rôle de figurant. Qu'à cela ne tienne, le monde taurin plébiscite le medio toro.
Bioman était "moitié homme, moitié robot", le medio toro est ni toriste, ni toreriste. Savant mélange d'un toro commercial moderne bodybuildé et d'un toro toriste édulcoré, le medio toro devient la norme toriste de la grande majorité des ferias. Les décideurs taurins tirent ainsi un trait sur le toro-toro. Réservé à une niche de toreros ne faisant déplacer qu'une niche d'aficionados obsessionnels de la lidia, le toro de verdad sera cantonné à servir la cause sur des affiches en papier glacé (cf dernière campagne de l'UVTF). La porte est maintenant grande ouverte au toro 2.0, pâle copie de ce qu'on est en droit d'appeler un toro, que la grande majorité des toreros consent à toréer, remplissant des arènes où le pet pèse de moins en moins lourd.